Jour : 186 km Total : 1733 km
Malgré
quelques réveils nocturnes et collectifs, je suis debout à 7h00.
La
file de motos, voitures, camping-cars est déjà longue une heure avant le
départ. Il est stupéfiant d’observer la quantité de véhicules entrant dans la
gueule d’un bateau qui pourtant ne paraît pas gigantesque. On a l’impression
que les véhicules qui entrent sont absorbés et s’engouffrent dans un puits sans
fond, créant ainsi un balai incessant.
Gaspard
vomit, nous sommes tous malades.
12/07/2013
12H30,
nous sommes en Norvège. Juste le temps de se voir confirmé que le
diesel est à près de 2 euros le litre (J’avais anticipé et fait
le plein au Danemark).
Nous
prenons la route de Flekkefjord , ville paisible qui nous permet de
dormir sur le port.
Nous
préférons poursuivre la route, nous ne voulons pas dormir avec les
autres camping-cars.. Nous changeons un peu d’argent, faisons le
plein d’eau sur le port et passons notre chemin. Cependant,
impossible de trouver un lieu satisfaisant pour la nuit. Après
quelques tentatives et échecs auprès de la population locale, nous
trouvons par hasard un petit camping désert qui fera l’affaire
pour la nuit. Il est 18h30 passée.
12/07/2013
Jour :
155 km Total : 1848 km
Petite
étape aujourd’hui.
Un
ferry et nous rejoignons le parking du Preikestolen , falaise ou
plutôt rocher de 600 m qui domine le Lysefjord.
Depuis
longtemps, je souhaitais y monter. 2 heures de marche annoncées. Je
laisse ma petite famille. 1 h 15 de marche et je suis en haut. La
montée n’est pas difficile mais pénible en raison des cailloux et
rochers.
L’endroit
est extraordinaire et bondé mais la foule ne gâche rien. Il est
stupéfiant de voir que cette plate-forme naturelle n’est pas
sécurisée. On y monte avec chiens, enfants et, de parole de
norvégien, il n’y a jamais eu d’accident. On se penche, on
s’allonge, on flirte avec le vide, on immortalise tout cela en
photos ou vidéos… « Allez Bjorn, recule d’un bon mètre…. »
(je ne sais pas le dire en norvégien).
Je
récupère la petite famille et nous nous installons sur le port de
Jorpeland. Un peu de vélo et quelques discussions avec des allemands
voisins de parking.
13/07/2013
Jour :
201 km Total 2049 km
Il
a plu toute la nuit.
Après
plusieurs hésitations sur l’itinéraire, nous prenons la route de
Roldal.
Un
ferry, une errance mystique dans la brume sur une route qui n’existe
pas sur ma carte et nous parvenons à Roldal, station de sports
d’hiver prisée qui abrite une jolie église (18 ème siècle) en
bois debout, architecture religieuse caractéristique en Norvège.
Les
paysages sont extraordinaires, les fjords interminables et
malheureusement, les endroits pour stationner sur le bord de la route
afin de photographier sont rarissimes.
La
route est parfois si étroite que les véhicules se croisent au pas.
Un van arrivant en face en a perdu une partie de rétroviseur. Le
chauffeur ne s’est pas arrêté, j’ai donc poursuivi ma route.
Nous
passons la nuit à Odda, sur le parking du stade municipal. Le
skate-park adjacent est un terrain d’aventure formidable pour
Gaspard et son vélo et pour les pieds peu assurés d’Emile qui
marchera bientôt, nous l’espérons. Le froid nous gagne vers
18h00. Nous ne traînons pas à l’extérieur.
14/07/2013
Jour :
321 km Total : 2370 km
Il a plu toute la nuit (bis)
Ferry puis déjeuner glacé à Voss.
Nous
arrivons à Bergen et profitons d’une après-midi d’accalmie
pour visiter son magnifique centre et le quartier historique de
Bryggen, ancien quartier commerçant de la période hanséatique,
construit tout en bois (14 ème au 16ème siècle).
Le
marché au poisson anime les quais, et ce, dans toutes les langues.
Les commerçants vendent et, comme l’indiquent les panneaux,
acceptent les euros, les cartes bancaires, les diamants et l’or.
Nous
reprenons la route sous une pluie battante. Nous nous garons pour la
nuit en bord de fjord.
15/07/2013
Jour :
258 km Total : 2628 km
J’ai
rangé mes tongs après avoir repoussé au maximum cette échéance.
Il
pleut des cordes, le vent est fort, l’air glacé.
Dans
de telles circonstances, autant avaler les kilomètres. Impossible de
se poser pour bouquiner ou se reposer, les petits sont calmes lorsque
nous roulons, difficiles à contenir dans les 8 m² d ‘espace
disponible lorsque nous sommes à l’arrêt. Nous roulons donc en
attendant des conditions plus clémentes.
Objectif :
Geiranger.
Pause-déjeuner
dans une station-service, tout comme hier.
Le
coût de la vie est exorbitant en Norvège. La bouteille de Coca Cola
que me tend les bras dans la station service est à 7 euros, je me
rabattrai sur la délicieuse eau du robinet remplie sur le port de
Flekkefjord quelques jours plus tôt. Sachez cependant que dans les
stations-services Statoil, le hot-dog est à 10 kr soit 1,30 euro.
Une excellente affaire et quelques dizaines de grammes de réconfort
dans cet environnement rude et humide…
Les
kilomètres défilent, petite pause à Styrne pour que les petits se
défoulent. Nous sortons le vélo sur le parking d’un supermarché…
Dit comme cela, ces vacances feraient rêver n’importe quelle
loutre…
Vous
allez me dire « l’important, c’est d’être en
famille ! » Mais non, le problème est là justement. Si
nous étions sans enfant, la situation serait moins complexe (et
j’aurais enfin le temps de lire quelques pages). Enfin, mon moral
ne flanche pas, animé par un optimisme indestructible qui a tendance
à agacer Anne-Gaëlle…
Les
tunnels sombres et interminables se succèdent. Nous passons un col,
des plaques de neige recouvrent les bas-côtés. La pluie, aidée du
vent redouble d’efforts pour nous réduire la visibilité. La
descente est vertigineuse.
Des
dizaines de cascades. De l’eau partout qui coule du ciel, des
montagnes, sur la route, qui tambourine sur le pare-brise. La Norvège
possède du pétrole et de l’eau douce en quantité astronomique,
elle est sauvée. Nous sommes trempés.
Enfin,
le fjord Geiranger s’offre à nous. Un camping, une douche pour
deux jours de repos bien mérités, 2628 km après avoir quitté
Paris.
16/07/2013
Jour :
221 km Total 2849 km
La
journée débute par l’habituel constat qu’il a plu toute la
nuit. L’eau tambourine sur la tôle. En guise de repos, nous
reprenons donc la route. D’autant plus que la météo n’annonce
pas d’amélioration dans les jours à venir. Départ tardif à
13h30.
La
vie à bord (avec toute cette flotte, je prends le droit de me
considérer à bord) n’est pas des plus facile mais nous rivalisons
d’imagination pour que les petits jouent et ne s’ennuient pas.
J’espère simplement, si le mauvais temps persiste, ne pas me
transformer progressivement en marionnette.
La
route s’élève en surplomb du fjord Geiranger. L’eau et le ciel
sont d’une couleur indéterminée. Les kayaks sont des confettis...
Nous
gagnons la Trollstigen (route des Trolls). Un serpent de bitume à 9%
et 11 virages. Aucune visibilité puis une fenêtre inespérée (de
quoi renforcer mon optimisme encore intact) pour photographier cette
route étonnante.
Nous
repiquons plein est pour tenter de retrouver un peu de ciel bleu. Je
fais plein de théories à Anne Gaëlle et toutes arrivent à la même
conclusion : nous aurons du beau temps. Quand ? où ?
Mes compétences scientifiques (inexistantes) ne peuvent pas le dire
avec précision.
Nous
sommes sur l’E6, l’Arctic Road, la route qui mène au Cap Nord.
Bivouac
merveilleux au cœur de petites montagnes et un discret rayon de
soleil sur le pare-brise vers 20h00. Évidemment, je suis le seul à
l’avoir vu, mais il y en avait un, je le promets !
17/07/2013
Jour :
219 km Total : 3068 km
Gaspard
a gravi sa première montagne au saut du lit, à la faveur de
quelques rayons de soleil. (Je vous avait bien dit que le soleil
était apparu hier…). Nos redescendons vainqueurs et fiers des 50
mètres gravis et la pluie se remet à tomber.
Les
montagnes se sont aplaties, les vallées se sont évasées.
Deux
heures de promenade agréables et humides à Trondheim. Gaspard nous
suit ou nous précède à vélo. Une glace afin de donner une
« touche vacances » à notre périple, malgré ce petit
vent frais et transperçant.
60
km plus au nord, nous trouvons un petit camping en espérant cette
fois-ci y rester deux jours pour souffler. Tout dépendra du temps.
18/07/2013
Jour :
347 km Total : 3415 km
Devinez…
Il a plu toute la nuit. Nous faisons donc manger les petits et
reprenons la route.
Les
paysages sont attrayants, douces collines, forêts denses et lacs
paisibles. Mais sous cette pluie, tout est gris. Fort heureusement,
la route permet de rouler à vive allure.
Arrivée
dans la sinistre Mosjoen où nous faisons quelques courses à Rema
1000, supermarché scandinave aussi froid que sombre, triste occasion
de faire marcher les petits.
Nous le savons, les cieux seront plus cléments, il faut persévérer.
Nous
traversons ensuite la ville fantôme et désertée, semble-t-il de
ses habitants. Nous sommes en quête d’un restaurant. Ne nous
laissons pas abattre, nous avons le droit de vivre des petits
instants réconfortants. Découragés par les prix astronomiques du
seul fast-food ouvert, notre réconfort sera fait de deux barquettes
de frites à la station-service.
Les
petits sont sages, ils s’accommodent de tout. Ce qui nous embête,
c’est de dire à Gaspard : « Quand il fera beau, nous
irons nous baigner dans les lacs, nous irons faire du vélo… ».
Car tous les jours, la pluie est de retour. D’autant plus,
que nous nous dirigeons tous les jours un peu plus vers le grand nord
et que les températures risquent de chuter…
A
la sortie du bourg, un petit lac. La pluie cesse. L’occasion de
jeter quelques cailloux dans l’eau et de tremper les pieds. Pour le
moment, les bottes sont encore indispensables mais le vent va
tourner, je vous le dis ! Le lieu est paisible, nous sommes
contents d’être à l’extérieur.
19/07/2013
Jour :
315 km Total : 3730 km
Lorsque
l’on combine deux paramètres : voyager dans les régions
proches du cercle polaire et voyager avec un petit de un an qui se
réveille au beau milieu de la nuit, on a l’immense privilège de
se rendre compte qu’il ne fait pas nuit à une heure du matin…
Le
temps est plus clément. Nous roulons à toute allure jusqu’au
cercle polaire que j’avais déjà franchi par la route en 2009 à
vélo en Alaska.
Les
mêmes paysages dépouillés, une belle ambiance polaire, le même
vent glacial…
Nous
arrivons à Bodo où nous souhaitons embarquer le lendemain sur le
premier bateau qui part pour les célèbres Iles
Lofoten.
Nous cherchons donc un coin pour dormir sur le port.
Une file de voitures, un ferry en partance. Nous obtenons une des
dernières places. Le départ est dans 15 minutes.
Trois
heures de traversée et de mal de mer plus tard, les crêtes
déchiquetées de montagnes se dessinent difficilement. Les nuages
sont hargneux et ne veulent pas nous les dévoiler complètement. Le
grand soleil, il nous faudra attendre encore… Je suis tout excité.
Nuit
dans le village de A (une seule lettre seulement), sur un parking
face à la mer.
20/07/2013
Jour :
26 km Total : 3756 km
Nous
quittons tardivement notre parking. La pluie tombe par intermittence.
Je suis très excité à l’idée de découvrir ces îles dont j’ai
tant entendu parler.
Mon
optimisme m’incite même à penser que ces nuages gris et noirs
sont une chance, les photos n’en seront que plus contrastées. Je
crois que c’est ce que les anglais appellent « dramatic
scenery ». A condition qu’il ne pleuve plus, je
m’accommoderai sans problème de ces nuages.
Nous
prenons un camping dans l’espoir de se poser 48 heures. A la faveur
d’une accalmie, deux heures de vélo avec Gaspard et quelques jets
de cailloux dans une cascade.
Nous
récupérons Anne-Gaëlle et Émile au réveil de la sieste, nous
nous préparons pour une longue promenade. La pluie se remet à
tomber. Tentative avortée. Le vent s’en mêle. Promenade
motorisée.
21/07/2017
Jour :
134 km Total : 3900 km
Le
vent a maltraité le fourgon toute la nuit.
Accalmie.
Promenade dans le village de A parsemé de petites bicoques rouges
sur pilotis. L’arrière-plan est extraordinaire. Des pics acérés
dominant la baie.
Route
vers Ramberg puis le pittoresque village de Nusfjord.
La
route est fabuleuse, les paysages sont fabuleux. Dramatic scenery.
Austérité et majesté.
Nous
posons nos pneus dans le port de Henningsvear, dans le froid, la
pluie et le vent.
A
22h00, le soleil chatouille les quais.
22/07/2013
Jour :
224 km Total : 4124 km
Brève
promenade dans Henningsvaer puis nous quittons les Lofoten pour
reprendre la route du Cap Nord.
Le
soleil apparaît bientôt. Enfin ! Pour la première fois depuis
neuf jours, nous ressortons tables et chaises pour dîner dehors dans
les vastes forêts du nord de la Norvège.
23/07/2013
Jour :
277 km Total : 4401 km
Nous
poursuivons notre remontée vers le nord, à travers des paysages
superbes. Montagnes enneigées, crêtes, lacs, fjords…
Le
soleil fait son apparition et mes prévisions, du moins mes
prédictions sont…optimistes.
Une
publicité pour un zoo arctique attire notre attention. Les petits
méritent bien une attraction après ces jours de pluie… Les tarifs
sont norvégiens évidemment. A peine le portillon passé, Gaspard
est attiré par un circuit de voitures électriques. Autant dire que
la visite du zoo ne l’intéresse guère. Il ne cesse de réclamer
ces fichues voitures. Accessoirement, bien que je n’aime pas les
zoos, celui-ci est parfaitement intégré au milieu. Lynx, loups,
ours, élans. La promenade est agréable et les animaux accessibles.
Les voitures ? 2,50 euros par tour de circuit…
Nous
posons nos roues en bordure du Kafjord.
Nous
dominons la mer au milieu de fleurs roses, en contrebas, une famille
pêche et fait cuire instantanément ses poissons sur une grille. Il
y a comme un petit air de paradis dans ce lieu extraordinaire.
Les
petits sont tout le temps dans nos pattes, il est difficile de
profiter pleinement de la sérénité du lieu mais nous y parvenons
par bribes et à tour de rôle…
C’est
décidé, à 1h00 du matin, je me lève sans un bruit (nous n’avons
pas tous la même version dans le fourgon…). Je profite seul de la
lumière du soleil de minuit, dissimulé derrière les Alpes de
Lyngen, haute chaîne de montagnes qui nous sépare de Tromso. Rien
ni personne ne peut troubler cet instant qui est le mien. Nuit
magique.
24/07/2013
Jour :
238 km Total : 4639 km
Il
est 10h30, le soleil est déjà haut, la chaleur perceptible. Gaspard
est réveillé, nous allons jeter quelques dizaines (centaines ?)
de cailloux dans l’eau. Quel calme ! Quelle paix ! Je
n’ai pas très envie de quitter ce lieu fabuleux.
Nous
prenons la route d’Alta et nous voyons nos premiers rennes.
Alta
est une de ces villes qui doivent terriblement souffrir l’hiver.
L’été n’est pas en reste. Les rues et la place principale sont
désertes. La ville ne ressemble à rien. J’adore ces ambiances
surréalistes. L’église est aussi surréaliste que l’atmosphère…
Quelques
courses, une petite glace et nous trouvons une place en or, en forêt
bordant le fjord…
25/07/2013
Jour :
227 km
Total :
4868 km
De
nombreux rennes sur la route. A Russeness, nous prenons plein nord.
La route du Cap.
La
route serpente dans les collines, la végétation se raréfie, le
brouillard est tombé, la visibilité est nulle.
Nous
arrivons sans trop savoir si nous y sommes au Cap Nord , à 4866 km
de Paris (latitude :71°10').
Le lieu, outre les stèles,
statues et monuments marquant le point le plus septentrional d'Europe
continentale, abrite une salle de cinéma, une chapelle, un temple
thaïlandais. Le monument emblématique du Cap Nord représentant le
globe, est situé en haut d’une falaise de 300 m de haut, dominant
l’Océan arctique. Évidemment, nous ne voyons rien mais nous
sommes heureux d’être parvenus à ce qui représente pour nous la
moitié du voyage. Je finis (déjà ?) la bouteille de whisky
emmenée depuis Paris…
Nous
dormons sur le parking avec le faible espoir que le vent chasse les
brumes.
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